FRÉDÉRIC Ier BARBEROUSSE

FRÉDÉRIC Ier BARBEROUSSE
FRÉDÉRIC Ier BARBEROUSSE

FRÉDÉRIC Ier BARBEROUSSE (1122 env.-1190) empereur germanique (1155-1190)

L’une des figures les plus attachantes de l’Empire germanique et de l’histoire du Moyen Âge européen. Frédéric Ier Barberousse s’est laissé séduire par l’Italie, comme tous ses prédécesseurs, et s’est efforcé de reconstituer un bloc politique formé de la Lombardie et de l’Allemagne: pourtant il n’a pas compris le mouvement communal, alors très puissant dans la vallée du Pô. Ces tentatives, qui lui ont coûté beaucoup d’argent et de temps, ont amoindri les capacités de résistance de l’Empire, qui se désagrégera en quelques années après sa mort accidentelle.

À la mort du dernier Salien, l’empereur Henri V (1125), plusieurs concurrents se présentent. L’un est le neveu de l’empereur et possède les Reichsinsignien , objets symboles de l’Empire, c’est Frédéric de Hohenstaufen, le père de Frédéric Barberousse. L’autre est le puissant duc de Saxe. Les grands préfèrent un homme qui s’est fortement compromis avec eux dans leurs luttes contre Henri V: ils élisent Lothaire de Supplinburg roi de Germanie. Les Hohenstaufen entrent dans l’opposition et se battent à plusieurs reprises contre les troupes impériales. Quand meurt Lothaire III, il laisse sa fille unique mariée au duc de Bavière, le Welf Henri le Superbe, à qui est promis en héritage le duché de Saxe, outre d’importants domaines impériaux en Italie. L’empereur lui a confié les Reichsinsignien : devant tant de puissance accumulée, les grands préfèrent alors élire Conrad de Hohenstaufen, puisque son frère est mort et que ses fils sont trop jeunes. En 1152, Conrad désigne son neveu Frédéric pour lui succéder après avoir eu de grandes difficultés avec la famille des Welfs de Bavière, qui supportent mal d’être évincés de l’Empire sans recevoir la Saxe en compensation. Comme Frédéric est le descendant des Saliens par sa grand-mère et que par sa mère Judith il est le neuveu d’Henri le Superbe, Conrad III espère que cette désignation va réconcilier les Allemands.

Une fois élu, Frédéric commence par régler le problème des Welfs: Henri le Lion, fils d’Henri le Superbe, fait duc de Saxe quelques années plus tôt contre la Bavière, reçoit le duché de Bavière de surcroît (juin 1154). Immédiatement après, Frédéric fait son premier voyage en Italie: il tient une diète à Roncaglia, où il reçoit les doléances de certaines villes lombardes contre la toute-puissance de Milan, qu’il châtie en détruisant Tortona, son alliée. Il prendra ainsi une série de mesures brutales contre la capitale lombarde, qu’il envahit et fait raser en 1162. Mais il connaît mal la capacité économique des communes italiennes et leur force politique: Milan constitue alors la Ligue des villes lombardes, qui infligera une défaite très grave à Frédéric en 1176, à Legnano. Ces villes sont soutenues dans leur résistance par la papauté, qui très vite est entrée en conflit avec Frédéric.

En effet, celui-ci se rend en Italie en 1154 pour se faire couronner empereur; il aide le pape Adrien IV à réprimer la commune romaine d’Arnaud de Brescia: il est couronné le lendemain de son entrée dans la ville (18 juin 1155), et les Romains qui se révoltent sont écrasés. Comme l’empereur dispose d’une armée assez réduite, il préfère retourner dans le nord de l’Italie. Une suite d’erreurs diplomatiques amène à la rupture: le nouveau chancelier de l’Empire, Rainald de Dassel, est un homme assez ambitieux, qui veut prouver la supériorité de l’empereur sur le pape en pratiquant la politique du pire. En 1159, la Curie élit Alexandre III pape, mais l’empereur suscite un autre pape, Victor IV. En 1164, quand meurt ce dernier, Rainald de Dassel fait élire Pascal III: le schisme se poursuit donc; dans l’Empire, à partir de la diète de Wurtzbourg (1165), tous les évêques doivent obéissance à l’antipape. Alexandre III excommunie l’empereur. Finalement, en 1177, il se réconcilie avec lui à Venise. La papauté ne peut alors empêcher Frédéric de s’allier aux Normands de Sicile et de marier son fils et héritier, le roi des Romains Henri, avec la sœur du roi Guillaume. Personne ne sait alors que celle-ci va se retrouver seule héritière du royaume, que son fils Frédéric II sera ainsi roi de Sicile et empereur d’Allemagne.

Dans l’Empire proprement dit, Frédéric réussit à maintenir l’ordre malgré plusieurs tentatives de résistance de la part des grands. Il défend en particulier, malgré Rainald de Dassel, son cousin Henri le Lion et s’entremet entre lui et les autres grands feudataires qui supportent mal les empiétements du trop puissant duc de Saxe. Celui-ci épouse en 1168 la fille du roi Henri II Plantagenêt d’Angleterre. Au moment où Frédéric a d’énormes difficultés avec les Lombards, vers 1175, le duc de Saxe refuse de lui apporter son aide. Dès que la réconciliation avec Alexandre III est achevée, Frédéric revient en Allemagne, convoque son cousin devant la Diète d’Empire pour qu’il se justifie des accusations de ses voisins. Ayant refusé de comparaître, Henri le Lion est mis au ban de l’Empire en 1179. Les Staufen ont démantelé la puissance des Welfs, mais la guerre reprendra avec leurs enfants, compliquée par l’intervention de Richard Cœur de Lion.

D’autre part, Frédéric a dû lutter contre certains ecclésiastiques très puissants, comme l’archevêque Eberhard de Salzbourg, Philippe de Heinsberg, son ancien compagnon. Il a aussi contre lui Berthold duc de Zähringen, que gênent ses prétentions sur les confins occidentaux de l’Empire. En 1155, en effet, Frédéric a épousé l’unique héritière du comté de Bourgogne; ce qui lui permet de consolider ses possessions familiales en Alsace, de disposer d’une route vers l’Italie sans passer par la Bavière et de lier les pays de la rive gauche du Rhône, qui relèvent de la mouvance impériale, aux territoires qui en sont le cœur.

Au Danemark, il a nommé Sven Peter roi, sous la suzeraineté de l’Empire (1152); le duc de Pologne Boleslas s’est reconnu son vassal. Il décide de se croiser en 1188 à la nouvelle de la chute de Jérusalem. Il laisse en Allemagne son fils Henri, couronné roi des Romains en 1169, et part par Ratisbonne et la vallée du Danube. L’armée est décimée par la chaleur et Frédéric se noie dans le Cydnos, petit cours d’eau de Cilicie.

Il a environ soixante-dix ans. Une légende allemande racontait, encore longtemps après, que l’empereur n’était pas mort et vivait dans une grotte; sa barbe, qui continuait de pousser, était devenue immense.

Frédéric Ier a construit ou reconstruit de nombreuses forteresses sur ses domaines souabes et alsaciens; mais ce seigneur féodal a été incapable de comprendre les villes, qu’il a brutalement châtiées si elles se rebellaient contre l’autorité épiscopale (Mayence, 1163) ou royale (villes lombardes). Avec lui va disparaître l’Empire: ses fils ne régneront pas assez longtemps; son petit-fils se sent plutôt sicilien et méditerranéen. Il n’a pas su «moderniser» assez les institutions de cet ensemble politique pour qu’elles résistent à quelques années d’anarchie.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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